30 avril 2006

Paris : Le Vert qu'est dans le fruit


Depuis que les Verts se sont assis sur les genoux du maire de Paris, l'excellent Bertrand D., je n'ai jamais vu couler autant de béton dans les rues de la capitale. Rien que dans mon quartier, il n'est pas une place ou un carrefour qui n'ait été copieusement asphalté : trottoirs avec gymkhanas pour les piétons, bornes casse-gueule et en plus, poteaux métalliques du plus bel effet.
Le débat est vif mais les intentions sont pures : rendre la rue au marcheur et au cycliste et dépolluer la ville. Louable projet.
D'ailleurs, pour prouver qu'on a raison, on a mobilisé les techniques les plus pointues : une grande "consultation" sur le "Plan de déplacements de Paris" (PDF).
Remarquez la finesse sémantique : "consultation" ne désigne ni un sondage, ni un référendum. On ne sait jamais…
Vous ne me croirez pas : je n'ai jamais entendu autant de gens râler sur les aménagements récents et pourtant selon l'étude en question, tout le monde est d'accord !
Alors je me dis : je ne fréquente que des râleurs.
Ou bien que des catégories socio-professionnelles sous-représentées dans les réponses.
Vérification faite (voir le rapport complet de l'IPSOS sur http://www.debatdeplacements.paris.fr/) : non plus.
J'ai bien une petite idée depuis le début mais vous allez trouver que j'ai encore mauvais esprit.

Voici quelques questions posées :

"Etes-vous d'accord avec cette orientation ?
"Contre (…) la pollution, [limiter] la circulation automobile, favoriser les piétons, les transports publics, les taxis, (etc.)
"[Pour] augmenter la fréquence des bus (…) métros, rer (…) baisser les tarifs (etc.)
"Quand ? (aux heures de pointe, etc.)
"Favoriser les [transports non polluants]"

Autrement dit : "Préférez-vous une ville saine et pratique à une ville moche et polluée ?"
"Préférez-vous être beau, riche et en bonne santé que moche, pauvre et malade ?"

Il faudrait vraiment être taré pour répondre négativement à toutes ces belles promesses en creux, non ?

Et voilà, le tour est joué. Les Parisiens soutiennent Delanoé.

Seulement il n'y a pas un métro en plus et comme m'a dit un pote "Les voies de bus ce serait super… s'il y avait des bus dedans !"
Petite polémique : Selon un reportage récent entrevu sur Canal + (renseignement Ratp), les 8 % claironnés par M. le maire correspondent à une augmentation de trafic, et non de métros !
Quand aux taxis, je les ai vus récemment manifester contre les pirates, mais pas pour l'augmentation du nombre des réguliers ! Que celui qui trouve facilement le soir un taco en dehors des gares me jette la première pierre !

Pas de chance, je suis parisien depuis toujours (moi !), grand marcheur, cycliste, usager des transports en commun et de temps en temps de ma voiture. Et promis, j'aime les arbres et l'air pur. Pourquoi donc suis-je si remonté ?

- Comme cycliste, j'aimerais bien connaître le technocrate qui a dessiné les pistes. Quand on a bien circulé entre bagnoles en stationnement et trottoir (les piétons évidemment traversent sans vous entendre arriver), on débouche le plus souvent sur une fin de piste ou encore un changement de côté absurde, un drôle de décrochement avec trois feux rouges et deux passages piétons.
Exemple : l'avenue Daumesnil, large et aérée. De la place sous les arbres pour matérialiser une jolie piste sûre et plaisante. Eh bien ! La piste est sur la chaussée (réduite à une seule file où les bagnoles, presque aussi nombreuses qu'avant, polluent toujours, mais au ralenti) !
- Comme usager du métro (plus rarement des bus, trop lents et pas assez fréquents), voir plus haut.
- Comme piéton enfin : formidable ! Certains trottoirs ont été agrandis (bravo) mais les plus étroits ne sont plus pratiquables à cause des poteaux anti-stationnement à la con.
- Comme automobiliste : B. D. a gagné. Je n'utilise plus ma voiture qu'avec parcimonie (elle compte, Parcimonie, dans le co-voiturage ?)
- Comme esthète : très joli, les bornes en plastique vert défoncées en deux jours ; les alignements de voitures au milieu de la rue ; les places bétonnées ; si si.

J'oubliais : contrairement à la plupart des villes de France, le ramassage des ordures se fait évidemment aux heures de pointe (entre 19 h et 21 h), ce qui, comme on sait, est une parfaite solution écologique et anti-pollution !!!

Je me plains, je me plains, mais j'ai encore la chance d'habiter intra-muros : comment font les milliers de banlieusards qui, faute de transports en commun transversaux digne de ce nom, sont obligés de passer par Paris ?

Je m'aperçois qu'au fil des lignes j'ai perdu cette ironie détachée qui faisait l'indiscible charme de mon blog. La passion sans doute, pardonnez cet égarement momentané.

Appel aux Verts :
Je trouve que Paris manque d'ours et de loups. Ne pensez-vous pas qu'il serait urgent de les y réintroduire fissa ?

Ça pourrait commencer par une consultation du type :
"Etes-vous personnellement favorable à la beauté de la nature ?"

140 194 oui.

29 avril 2006

Nouvelles des médias : Schonberg n'est pas le nom d'un musicien contemporain.




Béatrice.

« J’espère écrire d’elle ce qui jamais ne fut dit d’aucune femme. »
(Dante Alighieri, La Vie nouvelle)

Ah, Béatrice, chère Béatrice. Comment ne pas être envoûté par le charme de notre présentatrice de TF 2 ? Telle la Béatrice de Dante conduisant le poète dans la Divina commedia, ne nous conduit-elle pas au paradis de l'info ?
Ainsi ce soir samedi 29 avril, juste avant le match de la Caisse d'Epargne contre SFR (si j'en crois les maillots), voici ce qu'on apprend du monde dans le journal de la chaîne publique (dans l'ordre) :

1. Fête du football : ça castagne avant le match. Ouah ! super !
2. L'affaire Clearstream.
3. Manif contre la loi Sarkozy.

Heureusement, très vite, vers 20 h 07, on passe aux infos essentielles :

4. Une altercation dans un parc à Lyon. Un blessé.
5. Deux portes d'ascenseur volées dans une cité.
6. Un incendie dans une caserne de pompiers. Pas de victime.
7. Teknival à Bourges : un champ de blé rasé !!!!!

Entre deux ou trois autres infos fondamentales (– Désormais vous pourrez payer vos pv chez les buralistes – Le Concours Lépine bat son plein – Aux USA la glace la plus chère du monde), Béa évoque tout de même le prix du gasole (mouvement de pêcheurs à Arcachon), les problèmes avec l'Iran, les effets de la mondialisation même au Burkina Fasso. Erreur d'attention, sans doute.

Je sais bien que c'est pas notre Béa nationale qui décide, mais son rédac chef. J'aimerais bien savoir son nom et de quelle école de cirque il sort.

Les grands médias me fascinent de plus en plus. Portez-vous bien !

06 avril 2006

Les vrais progrès du vocabulaire !


A la dernière manif des feignants-qui-ne veulent-pas-prendre-en-compte-la-nécessaire-redynamisation-de-l'économie-en-France, il faisait encore un peu frisquet.
Ce printemps, décidément, tarde à venir.
Rayon langage, je méditais encore hier soir sur le pouvoir du lexique. Si t'as pas les mots, tu cognes ou tu brûles la voiture de ton voisin. Non ?
Alors je vous propose un petit cours pour vivre en harmonie avec le siècle.

Ne dites plus ACQUIS SOCIAUX, dites PRIVILÈGES ;
Evitez PRÉCARITÉ, dites FLEXIBILITÉ ;
Vous savez déjà que LICENCIEMENT, après DÉGRAISSAGE, se prononce maintenant PLAN SOCIAL ;
Pour RENONCEMENT, dites RÉALISME ;
Pour CONTRIBUTIONS SOCIALES, énoncez LOURDES CHARGES (-QUI GRÈVENT LE BUDGET DES ENTREPRISES) ;
De même, PROGRÈS SOCIAL se dira AFFAIBLISSEMENT DE L'ÉCONOMIE (-DANS UN MONDE CONCURRENTIEL) ;
Evitez SACRIFICE, préférez RÉFORME ;
Zut, pour PRIVATISATION je ne trouve rien : PRIVATISATION n'est plus un gros mot. Vous voyez qu'on avance, dans la novlangue libérale !

A y est, vous êtes MODERNES. Enfin je veux dire : CONTEMPORAINS, quoi. En art, à la rigueur, vous pouvez employer POST-MODERNE, qui veut tout dire et son contraire.
A propos, si vous êtes à Paris, allez vite voir Bonnard au Musée d'Art… Moderne. Et constatez une fois de plus que les reproductions à la sortie n'ont que peu à voir avec les œuvres originales.

Ne dites plus IL NOUS GAVE AVEC SON BLOG : dites VIVE LA MIE DES VEAUX !