18 septembre 2019

En même temps !



Un site sans métaux lourds
 et à Haute Qualité Environnementale



Chers affiliés bronzés et pimpants après le bel été,

Me voilà retrempé dans l'urbaine civilisation. J'ai rallumé la télé et l'ordinateur :
Achète ! Achète ! Achète !
Dans le métro et sur les panneaux de pub géants posés devant les grands travaux parisiens que j'aime tant :
Achète !
Sur les sites internet mollement visités pour réviser le temps de cuisson du haddock :
Abonne-toi ! Achète !
Sur TSF Jazz, entre un Miles Davis et un Vincent Peirany :
Du poulet à 3,95 le kilo ! Un SUV à 25 000 boules !
Sur France 1 ou Canal 12 :
Deux coupures de pub (bientôt trois) au milieu du film ! Achète !

Et entre les deux, la petite musique saturnienne de l'écologisme ordinaire :
On est foutus ! Jette tes pailles ! Arrête le boudin ! Prends pas l'avion ! Evite les pommes ! Fous ta bagnole à la casse !
Roule en trottinette à énergie nucléaire… Prends ton smartphone à métaux rares… Utilise de l'énergie éolienne à 1 000 tonnes de béton chacune, coulées dans la terre agricole… (Au moins les solutions sont simples pour les nouveaux apôtres)…

Moi qui croyais que c'était l'accélération vertigineuse de l'internationalisation capitaliste et la démographie galopante (7,5 milliards de frères z'humains, presque 10 milliards dans trente ans !) qui posaient problème !

C'est les pailles. 

Nous voilà dans un monde de paradoxes où entrent en collision tous les yin et les yang. C'est pas nouveau, mais on n'est pas rendus.

Bon appétit !



Les paradosques de l'Eposque

1. Nos amis Bretons



Premièrement,
Les Bretons sont sympas : ils ont plein d'initiatives vachement écolos et ils adorent les assoces bioethniques et la convivialité ++.
Seulement voilà, 
en même temps :
La Bretagne est l'une des régions les plus polluées de France (algues vertes, rivières pourries, pics de pollution aux particules fines en avril dernier) à cause de l'agriculture intensive : engrais azotés, lisiers et fumiers provenant des élevages porcins ! 
Pas de veine, Nolwenn…

2. Nos amis Helvètes


Tas de bois dans le Jura suisse

Les Suisses sont les champions de la propreté, du tri et du ferroutage. Les déchets, le CO2, les pratiques et produits malencontreux : Not in My Backyard (NIMBY) !
Mais… En même temps… 
Des multinationales suisses (ou leurs sous-traitants) déforestent à donf pour la culture de l'huile de palme (Nestlé par exemple), contaminent un fleuve en Colombie, empoisonnent des paysans à coup d'insecticides (Sygenta), en expulsent d'autres pour une mine au Pérou (Glencore), sous-traitent le travail d'enfants dans une mine au Burkina… etc. ¹
Pour être honnête, certaines ONG et citoyens suisses commencent fort à s'en émouvoir…

3. Les écolos parigots

Végétalisation à coups de béton dans le XIIe


Dame Hidalgo — que les dieux de l'écologie et de la démagogie l'aient en leur sainte garde ! — multiplie à Paris les initiatives "vertes". Ainsi, elle développe la plantation sur les trottoirs, les pistes cyclables, et plante du gazon. Il y a de belles autoroutes à vélos 
mais en même temps…
Le béton coule à flot. Les places parisiennes sont défigurées pour en faire des squares vieux-jeu. Travaux omniprésents, constructions incessantes d'immeubles et d'hôtels, embouteillages infinis… des milliers de tonnes de béton pour un mètre carré de gazon ! (Tout est déjà dans ma chronique d'avril dernier, faut que j'arrête : à propos de Sœur Anne et de ses ouailles, je vais encore perdre la sereine pondération qui fait l'incomparable charme de ma Mie.)

4. Et pendant ce temps-là, au Burkina

Grâce à l'installation récente de sociétés minières étrangères (britanniques, canadiennes, états-uniennes…), le Burkina Faso est devenu le quatrième producteur d'or d'Afrique ! 
Mais en même temps…
Avec 744 dollars annuels par habitant en 2019, c'est l'un des pays les plus pauvres au monde ; il est 183e sur 187 à l'indice IDH (Indice de Développement Humain des Nations-Unies)
C'est pas doux, Ouagadougou…

5. Les journalistes des grands médias²

Ils ont fait des études poussées, ils sont assoiffés de vérité et soucieux de dénoncer les contradictions de leurs interviouvés…
Mais en même temps…
Ils sautent sur tout ce qui bouge, avec la bien-pensance qui va avec, et régurgitent sans les interroger les moindres chiffres sans aucune vergogne. En particulier les pourcentages, qui ne signifient pas grand chose sans contexte ni nombres absolus. Je ris encore du bulletin de France Inter, répété plusieurs fois fin juillet, annonçant qu'à cause d'un début de canicule, il y avait eu TROIS morts aux USA. Trois. Dont un pas sûr ! Sur 327 millions d'Etats-uniens, on SAIT de source sûre qu'il y a eu trois victimes… Malheur ! Heureusement que pendant ce temps-là, il ne s'est rien passé en Afrique ou en Asie !

6. Les marcheuses



La prostitution et le racolage restent permis en France, mais pas leur utilisation (l'achat de services sessuels) !
Va comprendre, Riri !

7. Les conducteurs immobiles

Il est dangereux de conduire et de téléphoner en même temps. C'est interdit. Mais un arrêt de la cour de cassation du 2 février 2018 précise que c'est également interdit – vous allez rire –… à l'arrêt, moteur arrêté !!!
Car il n'est pire danger qu'une voiture à l'arrêt… 

8. Les personnes sous tutelle…

… viennent d'obtenir (j'apprends ça sur France Inter) le droit de vote sans exclusive. Autrement dit, des personnes réputées incapables de gouverner leurs propres affaires vont pouvoir (sans décision du juge des tutelles) décider des affaires des autres.
Nous vivons une époque moderne.

9. Les aveugles…

…viennent d'obtenir le droit de piloter un avion de plus de 300 passagers.
Non, là je déconne…




Un instant de sérénité devant le beau lac Léman


Allez, pendant que la terre s'évapore et pour finir sur quelque chose de léger, quelques mots sur les mots :

Le baromètre des temps qui courent 

 Vu Francis Bacon à Pompidou…
…toujours aussi superbe et morbide !


Très très en vogue chez les journaleux :

Sidération
Nauséabond
Checker
Déceptif
Versus
Iconique
Alignement des planètes
Silence assourdissant
Très tendance : la confusion entre l'interrogatif et le relatif. Ainsi, l'on entend de plus en plus souvent :
"Je ne sais pas quelle pizza (basket, liquette) va-t-il choisir" ou "Il se demande qui est-il vraiment"

Inventions à la sauce anglaise (tout substantif doit pouvoir se décliner) :
"Ça risque de déflagrer"
"Ça a été absenté"
"Est-ce qu'il va breaker ?"
(expressions entendues dans le poste)

Les patronymes qui me font rire :
Lyes Louffok
Thomas Vampouille
Quentin Dupieux
Yann Raison du Cleuziou
Guénola Hesdin de Méherenc de Saint-Pierre

Pioché dans mon extra-plate lucarne :
HÉPAR : La joie d'avoir un bon transit !
C'est tout le mal que je vous souhaite, chers suiveurs !

Allez ! n'oubliez pas :
Amis écologistes, peignons novembre en mer !

Ce sera beaucoup plus gai comme ça. 

Merci à Joël Martin, La Bible du Contrepet (Bouquins, Robert Laffont, 2003)

_____________________________

(1) Vous trouverez facilement sur internet de plus amples infos. Par exemple ici :

(2) Pas tous : pas question d'essentialiser !







27 avril 2019

Anne, ma sœur Anne, supplique à Hidalgo



— Anne, ma sœur Anne 
(criait tout bas la femme de "La Barbe bleue" de Charles Perrault en 1697)

— Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
— Je ne vois rien que le soleil qui poudroie et l'herbe qui verdoie.

— Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
(criait tout haut un Parisien excédé en 2019)
— Ben non, je vois rien… mais c'est à cause des 6079 putains de chantiers … qui font le soleil poudroyer comme un malade !
(répondit la maire excédeuse)
— Mais pourquoi l'herbe verdoie-t-elle ?
(demanda un autre parisien bleu de barbe naissante)
— Ben c'est pasque à l'Hôtel de de Ville on pense que le progrès c'est le gazon. Et le vélo, je te ferais remarquer. Espèce de Ducon rétrograde.

Et c'est ainsi que nous entrâmes dans la Verte modernité :

En défigurant allègrement toutes les belles places (Bastille, Nation, Italie, Panthéon, Madeleine, Fêtes, Gambetta) (1)
En transformant les grands axes et les belles perspectives en parcours du combattant : bornes, contre-allées devenues parkings, pistes cyclables dessinées en dépit du bon sens, (où passent 20 vélos par jour !) ;
En multipliant les tracés vélos à contre-sens dans les petites rues ;
En laissant les chantiers privés porter leur emprise tous les cinquante mètres… Je n'aurais jamais cru que l'exigence écolo fût de laisser ainsi couler des milliers de tonnes de béton : 3461 échaffaudages en mars dernier (1) !

Résultat : un fouillis impénétrable et puant, des bouchons à toute heure du jour et souvent la nuit, un paysage urbain dénaturé… pour la bonne cause !

Chère sœur Anne,
Tout le monde partage l'espoir d'une ville dépolluée avec des espaces verts
On applaudit même à des mesures rafraîchissantes comme la piétonnisation de certains quartiers (périodiquement pour commencer) ;

Hum. Seulement voilà…
Moi, en tant qu'humble Parisien de Paris depuis soixante-dix balais (comme piéton, cycliste, scoutériste, usager des transports publics),
Chaque fois que je prends mon vélo aujourd'hui, je flippe plus que dans les années soixante et septante, où je traversais allégrement la place de l'Etoile dans le flot des bagnoles en tendant le bras avant de tourner ! (2)

Il me semble que depuis le haut de la tour du château de Barbe Bleue, vous ne voyez que la poudre à l'horizon, bien chère maire…
Et le Paris dont vous rêvez, j'en vois déjà de superbes échantillons, comme l'autre jour au quartier latin, dans la foule des touristes avec leurs prothèses à selfies, ou dans les salles du musée du Louvre où j'adorais flâner, maintenant inaccessibles… Quand je serai Président du monde, j'interdirai le tourisme de masse. D'ailleurs tiens tiens, c'est pas bon pour la planète.
Paris devient un décor d'opérette, (mais avec des travaux tous les dix mètres) qui peu à peu se vide de toute substance, une carte postale, interdite aux banlieusards (pas de parkings aux portes de la ville, contrairement à beaucoup de grandes villes européennes) et peuplée seulement de bourgeois friqués avec quelques logements sociaux pour faire joli parce que quand même, on est socialiste ! 
Et du gazon
Ceux qui soutiennent votre action ne mettent jamais un pied dehors (sauf à Ramatuelle ?) ou n'ont pas d'amis extra-muros !
Et entre nous, s'il y a moins de particules fines en surface, je te jure qu'il y a, en sous-sol dans le métro, des particules… fortes. Mais les bus sont si rares…


Voilà, chère Anne, ce que je vous aurais écrit si vous n'aviez la tête ailleurs, car, chaque fois que j'ai émis une observation auprès de vos services, j'ai reçu une réponse du genre : "Il faut accepter les nécessaires transformations si l'on veut évoluer". Autrement dit :
"Ferme la, connard, t'es pas capable de réfléchir car tu n'es qu'un affreux passéiste".

Qui cite Perrault, en plus.


A propos de Bluebeard

Pour le plaisir et la culture (et pour apaiser quelque éventuel émoi féministe), voici l'ironique "Autre moralité" de Charles Perrault à la fin de son conte "La Barbe bleue" :

Pour peu qu'on ait l'esprit sensé
Et que du monde on lâche le grimoire,
On voit bien que cette histoire
Est un conte du temps passé.
Il n'est plus d'époux si terrible,
Ni qui demande l'impossible,
Fût-il malcontent et jaloux.
Près de sa femme on le voit filer doux ;
Et de quelque couleur que sa barbe puisse être,
On a peine à juger qui des deux est le maître.









(1) : Source : Le Parisien, 27 mars. "Pour rendre Paris aux piétons" : j'ai rien demandé, chère Anne. Non plus que les joueurs de pétanque de la Nation, qui avaient déjà largement de quoi s'amuser…
(2) Cela dit, ne pas être piéton à Amsterdam ni à Strasbourg, où les cyclistes roulent comme des dingues !






14 février 2019

Y a pas de souci !

Mais qui c'est çui-là ?
Vous avez l'impression de le connaître ?
Normal, c'est Boris Vian dans Notre-Dame de Paris,
de Jean Delannoy (1956)


"Y a pas d'souci", c'est ce qui remplace "Y a pas de problème". Avant on avait des problèmes, avec sa tête… aujourd'hui on a des états d'âme. Ça remplace même "Je vous en prie, cher monsieur". Blanche Gardin en parle avec son humour saignant quelque part.

Mais revenons à nos fondamentaux, chers émaux valides.
Ces mois-ci, j'ai récolté dans ma nasse quelques belles variétés roses et charnues des actuelles tendances de notre superbe langue de veau. 
Si vous ne voulez point, comme mézigues, passer pour un has been,
Veuillez télécharger les dernières updates :

Le lexique

En promo,
Du coup et En fait cassent la baraque (grâce aux moutards, principalement). 
On pète également beaucoup de plombs ou de câbles, à tout propos. On pète d'ailleurs tout court et ça fait beaucoup rire, même après l'âge de 8 ans et demi.
Expérience et dommageable (à la place de "dommage") tiennent bien le coup. Chez le journaliste, tarmac (pour "pistes") est devenu incontournable.
Inclusif et disruptif sont de vrais tubes (hits). 
Iconique, utilisé pour emblématique, suinte encore la marée atlantique et réjouit les jeunes gens modernes…
Au rayon des barbarismes très en vogue : déceptif trace son chemin, suivi par l'incommensurable malaisant
Candidater (pour "postuler") fait maintenant partie du paysage commun.
Quant à "l'Outre-mer", il est devenu (depuis un bout de temps, pardon !) les Outre-mer. Ça en fait plus pour le même prix, comme ça.
L'alignement des planètes et en découdre sont en grande forme. 
Compliqué (complicated) remplace ou euphémise un tas de qualificatifs, comme l'avait fait "impacter" il y a quelques ans.

"Pour l'anecdote" est fréquemment devenu (allez savoir pourquoi) pour la petite anecdote. Et de manière générale, le renforcement redondant (ça dure encore, retour en arrière) semble s'installer durablement. Pléonasme n'est donc pas encore sorti des rangs…

La prononciation

Gilets jeunes auprès du poil…
Je ne suis pas d'une région où l'on distingue vraiment le son "ain" de pain, lin, fretin, du son "un" de lundi, brun et parfum (sauf "brun", peut-être) ! 
Mais allez savoir pourquoi, mes neurones font la gueule quand j'entends prononcer "patte" à pain ou "poil" à frire. Et les "o", par exemple, celui de sot et celui d'Europe tendent à se confondre, car les médias audiovisuels (comme on disait autrefois) sont friands d'animateurs d'origine méridionale. 
Et l'on entend fréquemment "Peul Emploi", "anticycleunes" ou 60 % des "embeuches"… Castaner, tout frais arrivé de Forcalquier, voit des "gilets jeunes" partout…

La liaison décalée
Assez tendance en nos extraplates lanternes… "Le verdict aurait été t'encore tout autre", "des offres qui ont vu t'affluer…" (FR 2), "deux millions de touites ont été t'écrits", "Cela met fin t'à la polémique…" (médias divers)

Plus de liaison du tout…
Dire qu'on entend encore de nos jours de naïfs étrangers qui essaient de prononcer les liaisons ! Ptr !
Sottise, Marquise : lier n'est plus de mise… De Gaulle prononçait "qu'un sang gu'impur abreuve nos sillons". Au cours de mes jeunes années (courent-dans-la-montagne), on disait "mort-t'au-rat", "quand t'on n'a que l'amour" (imaginez : quan hon !), "de temps z'en temps". Et v'là que je commence à entendre, un peu effaré, "pas hà pas"… Ah qu'il est dur de vieillir…

Le H aspiré, 
…c'est comme l'imparfait du subjonctif ou même le passé simple, ma pauv'dame, on n'en cause même plus : "Un nombre en n'hausse, Journée nationale de l'hamburger, il est t'hors de danger (médias divers), les enfants victimes d'harcèlement (M6), la ville s'hérisse (FR5, chaîne culturelle), nous étions des z'harceleurs". Etc. 

Petit couizz pour les amis lettrés à l'ancienne :
Je vous propose un petit egzercice de prononciation pour tous (lors d'un enregistrement de voix, on a essayé de me faire prononcer magnat avec le gn de agneau…) Comment diriez-vous :
Magnat, agenda, ananas, pugnace, mœurs, exsangue, abasourdir ?
(Je ne vous suggère pas gageure car vous n'êtes pas non plus nés de la dernière pluie).
Le plus habile d'entre vous gagnera un éplucheur de framboises.

La syntasque
Sachez qu'on a perdu l'usage du EN et du DONT (et ses cosaques) ! 
Qu'est-ce que vous me disez, gentils locuteurs lecteurs de ma numérique gazette ?

"Il faut savoir de quoi il en retourne" (un journaliste). Quoi, des claques ?
"C'est d'eux dont j'avais envie de parler" (Nicolas Mathieu, prix Goncourt 2018… à l'oral, heureusement, et sous le coup de l'émotion). Il faut reconnaître que Verlaine lui-même ("Prends l'éloquence et tords-lui son cou", in Art poétique, Jadis et Naguère, vers 1874)…
Gros succès également de la formulation : "Elle s'est faite renverser" ou "Elle s'est faite connaître"…
Celles et ceux, raccoleur de bien pensance, gagne le gros lot de la lèche-culterie, il faut s'y faire ! (j'ai même un philosophe médiatique qui pense comme moi, c'est dire !)
Ne vous cassez plus la nénette avec de longues phrases alambiquées style Sauveur jupitérien de l'Olympe, dites : "Entre la poire et entre le fromage" : "Il y a une cohérence entre la marque et entre le produit" (La 5)…
Entre ici, J'en moule un ! Avec ton terrible cortège de barbarismes joyeux et d'approximations up to date… 


Tonton c'est loin, l'Amérique ?


Au rayon du frangliche ordinaire

Quand j'étais une jeune fille rangée, je faisais des "dictées" et j'apprenais le système "métrique". T'imagines le malaise : le XIXe siècle, les machines à vapeur, le lait cru à la tireuse ? 
Dieu merci, l'autre jour, j'ai reçu un sms avec Save-the-date pour acheter un 18 pouces à l'occasion du Black friday !

Award semble avoir détrôné définitivement "prix" et live, "en direct" ou "en concert".
Teaser remplace "accroche" ou "extrait", et spoiler (francisé en infinitif) "dévoiler, révéler". Stopmotion, "animation", timelapse, "accéléré", shooting, "prise de vue" (pas nouveau celui-là). 
Je vous fais grâce des jargons du management, de la pub, de l'informatique et du reste de l'audiovisuel, que vous connaissez aussi bien que pas-moi. Vous n'avez qu'à checker vous-même. Versus, ce mot latin qui remplace "contre" nous revient par l'Atlantique comme jadis par la Manche flirt pour fleurette.

Décidément, si les Ricains n'étaient pas là, comme disait Victorien Sardou, — non Fernand, — non Michel — en fait Pierre Delanoë — idée confirmée récemment par Trump Donald –,… on causerait allemand. Heureusement, on cause américain. Et on met des chewing-gums partout, c'est malin. 

Une expression rigolote que j'aime bien (j'ai aussi mes faiblesses) :
Attention, ça va piquer (utilisé aussi bien pour "tu vas te viander grave")





Sinon, quoi de neuf, mon Justin ?

Les nouvelles valeurs à considérer

Côté pile :
J'apprends qu'à Montréal (Canada), l'humoriste Zach Poitras a été interdit de scène pour cause d'appropriation de signes appartenant aux Noirs. Pour certains, les dreadlocks sont en effet un modèle déposé ! Mais qui a déposé la crétinerie ?

Côté face :
Un poilu transgenre (même pas opéré), Rachel McKinnon, a gagné une épreuve de cyclisme… féminin, en octobre dernier à Los Angelès…

Tu ne jetteras rien, mon fils

J'ai pas de pot, moi. Issu de parents d'origine modeste qui avaient connu les privations de la guerre, j'ai passé une grande partie de ma vie à ne pas gâcher ("finis ton assiette !"), ne pas jeter les choses inconsidérément ("ça peut toujours servir") et éviter si possible une consommation d'eau et d'énergie excessives ("éteins quand tu sors").
Dans les fêtes, je privilégiais les verres en verre et les nappes en tissu ; il m'est même arrivé de porter le rab de bouffe aux Restaus du cœur.

Au point que je finissais par en avoir honte, comme d'une névrose. Même si je voyais bien que gaspiller était aussi un signe de reconnaissance sociale ("je suis pas mesquin")…

Du coup, j'avais fini par me soigner et j'étais fier, encore récemment, d'oser jeter une demi-part de purée de panais restée dans la casserole. Bon : le panais c'est facile, direz-vous. Alors mettons : du chou-fleur, de la courge, du persil tubéreux, des crosnes, des tomates belges.
Je te jure, pour moi c'était une libération que de me séparer de mes vieux Téléramas, Marianne ou Libé… d'un câble d'antenne de 15 m, d'une vieille prise péritel, de mon premier portable sony-ericson, de mes vieilles cassettes (pas toutes, quand même) !!! Mais…

On me dit aujourd'hui que ces maux n'ont plus cours
Qu'il vaut mieux rien jeter et recycler toujours
Que l'océan rempli de plastique en a marre
Et qu'il vaut mieux toujours réparer sa guitare (1)

Quand je vous dis que je ne suis plus en phase avec l'époque.

Ce qui ne m'empêche pas de réfléchir :
Il y a dans le monde 37 millions de vols d'avions par an (plus de 100 000 par jour) ; 
Combien de milliers de camions diesel traversent l'Europe ?
Les insecticides auraient détruit 80 % des insectes en 30 ans (source : une étude allemande de la revue Plos One) ;
Heureusement, on a trouvé la solution : les pailles et les cotons-tiges. (Ce truc doit encore venir de nos amis étazuniens, qui vivent littéralement avec une paille dans le bec et un gobelet en carton vissé au bout) ! 
Rien sur les couches jetables, les kleenex et la bouffe toute prête en blister !
Je rigole. Ah on me dit que le trafic aérien ne serait responsable que de… 2 % de la pollution atmosphérique. D'où vient ce chiffre ? Des compagnies aériennes ?
Je rigole derechef.

L'écologie est incompatible avec le capitalisme mondialisé et la surconsommation.  
Et incompatible avec la démographie galopante : moins on est de fous…
Mais les solutions ne sont pas aussi simplistes, hélas, que certains le croient :
Une voiture électrique a une batterie de 700 kg. Pour la fabriquer, on met en place des procédures extrêmement polluantes. Et ça va marcher avec l'énergie nucléaire. C'est compliqué la Vie claire.
Le labour, soutenu par beaucoup d'agriculteurs bio pour éviter les pesticides, accélèrerait l'appauvrissement des terres. Et multiplierait par 10 la combustion de carburant polluant… C'est dur, la culture.




YUKA : l'appli (un peu) nulle pour les nuls.
Les jeunes gens sympathiques qui l'ont lancée le reconnaissent eux-mêmes : ils n'y connaissent pas grand chose et se contentent de collecter une liste d'infos diverses et de la traiter à leur sauce (bio), avec une obsession sur les additifs et les calories, ce qui ne suffit pas toujours et biaise les recommandations. La confiture, par exemple, est toujours… trop sucrée. Le sel est trop salé et mes camemberts au lait cru Label rouge et/ou Médaille d'or au Concours agricole refusés. Alternative proposée, un fromage frais à zéro pour cent ! (rectifié depuis !). En revanche, des cœurs d'artichauts sans aucune indication d'origine passent le test allégrement. 
Dernière heure : je viens de scanner deux boîtes de sucre bio et hum, pan sur le bec, Yuka avoue "Nous ne savons pas juger ce type de produit". Peut-être affinent-ils l'outil, ce qui serait une bonne nouvelle ? A moins que… Voyons, je viens de tester des produits dans mes placards, les voilà tous excellents… Bizarre.


Au fait, je vous ai pas dit ?

Cette rubrique est pleine de classe !

(merci à Joël Martin, Bible du contrepet, Bouquins, 2005)


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(1) Pour les jeunes générations ou les Martiens, ici je m'inspire d'une chanson de Jean Ferrat. Sauras-tu trouver laquelle ?