14 novembre 2022

En fait on sait pas c’est qui, du coup !


Faut que je refasse ma copie. J’avais rédigé ma nouvelle chronique (post) sur un ton râleur — on aurait pu croire que j’avais l’esprit bilieux. En plus, j’arrosais large, alors qu’en vérité j’adore l’espèce humaine !


Donc, je reprends tout, mais en positif ; life is beautiful et le bonheur est en marche :





Je r’aime les meufs.


J’étais par exemple devenu misogyne en écoutant Sandrine Rousseau et ses copines. Avec le nombre d’âneries haineuses qu’elle est capable de proférer à la minute, je pensais qu’elle avait raté ses études et sa vie privée,… Même pas ! J’apprends qu’elle a des diplômes, un mari et des lardons ! Ouf ! 


Mais en vérité je vous le dis, ce qui me fait r’aimer les femmes, ce sont plutôt les Elisabeth Badinter, Natacha Polony, Delphine Horvilleur (la rabbine), Blanche Gardin (l’humoriste), Julia De Funès (la philosophe), Sabine Prokhoris (la psychanalyste), Catherine Millet etc… Ce qui me fait r’aimer les meufs, ce sont les courageuses femmes iraniennes qui luttent contre la connerie !






Je suis content.


Tous les jours sur les radios et les télés (publiques surtout) on me parle de sexe (dans toutes les acceptions, toutes les variantes et toutes les positions)…

Un questionnaire de la Mairie de Paris me permet de choisir, sur la page de l’identité, entre Homme, Femme, et Non binaire ! J’ai tout de suite interrompu le bazar, mais j’ai sans doute eu tort : n’est-ce pas là un progrès considérable ? J’entendais l’autre soir une prof amie d’amie se réjouir de ce qu’un de ses élèves à la fac fût arrivé en jupe, et qu’un autre lui demandât de l’appeler d’un prénom féminin. Elle dit « ces jeunes sont d’une liberté incroyable ! » Je ne pleure pas, mais il ne lui serait pas venu à l’esprit un instant que ces boutonneux géniaux pussent être au contraire purement et simplement – outre quelques cas avérés – fashion victims et bêtement panurgiques ? Cet âge a envie de se faire remarquer (en suivant le courant), vive la jeunesse ! Certains furent staliniens ou maos par capillarité adolescente en des temps pas si lointains !






Je suis apaisé.


Je deviens joliment régressif, c’est un bonheur quasi-fœtal qui me gagne en ce joli XXIe siècle : 

Dieu est mort, mais Lui merci, L’Etat et les Marchands me montrent la Voie Morale et me guident vers les Bons Comportements :


— Achetez cette voiture mais ne l’utilisez pas trop

— Roulez à 30

— Choisissez mon beau saucisson mais mangez des fruits et légumes

— Vous pouvez acheter des cigarettes mais surtout ne fumez pas

— Buvez, mais avec modération

— Achetez l’iPhone 18, mais attention aux écrans : pas plus de 18 h par jour

— Faites du vélo, marchez, courez

— Ne dites pas de mal de votre voisin

— Portez plutôt un masque


De plus, grâce aux émissions dédiées de TMC ou W9, qui sont devenues des chaînes auxiliaires de police et de gendarmerie,

 

— Vous éviterez de rouler 15 km/h au-dessus de la vitesse autorisée ou sans gants pour un motard. 

La grande délinquance n’a qu’à bien se tenir !


Et la plus rigolote (ça vient de sortir) : 

— Quand vous ouvrez la porte de votre voiture, servez-vous de votre main droite, comme ça vous êtes obligé de regarder vers l’arrière en cas de solex surgissant ! (message du gouvernement !)









Je suis émerveillé.


Comme un enfant au moment de Noël, j’ai aujourd’hui l’impression de vivre en permanence dans le monde merveilleux d’un centre commercial ! C’est le mall du siècle !

Dès potron-minet, sur TSF JAZZ, je sais que le poulet (on est mal, patron) est à 7,85 la barquette de douze kilos chez Lidl. Sur Inter c’est Air Transat ou autre. Heureusement, la suppression récente, sans débat, de la redevance audiovisuelle, va permettre aux marchands de nous régaler plus encore de leurs alléchants produits ! Vers les onze heures, à l’heure du bouillon, c’est les vidéos de Youtube qui s’interrompent toutes les 4 mn pour me vendre le dernier ordi à douze vitesses, et vers 13 h avant le journal je n’ignore rien des culottes anti-fuites ! C’est merveilleux ! J’apprends même que ce sont maintenant les hommes, ouf, qui lancent les lessives et le lave-vaisselle (mais qu’est-ce qu’elles foutent, les feignasses, commente Roro ? Elles fument un cigare dans le poltron-et-sofa avec un ouisky ? — quel rustre, ce Roro !) Dehors, ah qu’il est doux de retrouver Hermès ou Iphone en déco géante sur les palissades des grands travaux parisiens ! Qu’il est joyeux de continuer à mater ces belles pubs en couleurs lumineuses sur les 950 écrans (ce chiffre est avéré) du métro parisien ! En rentrant je tombe sur un Obs’ laissé là par une amie : c’est mieux qu’un catalogue de la Redoute ! Et le soir, regardons un bon block buster pourrave amoureusement coupé en trois ou quatre par TF1 ou M6 !

Nous avons perdu Dieu et Marx, vive la conso joyeuse et décomplexée !







Je me cultive.


Avec les nouveaux programmes sur ma box (l’Educ Nat ferait bien de s’en inspirer, car la haute culture a changé d’enjeux), qui vont par trois chaque soirée :


— Le meilleur forgeron. (Sur les chaînes à Bolloré. C’est comme le Meilleur pâtissier mais avec des bouts de ferraille. Et ça dure trois fois 50 mn !)

— 100 jours avec la police municipale de Perpignan (ou Bécon-les-Bruyères. Il y a vraiment des petits délinquants qui exagèrent, moi je trouve.)

— Cleaner les Experts du ménage (ça existe vraiment ! Pourquoi un titre en anglais, je sais pas)

— Tiny House : mini maison sur mesure. (GULLI. Si tu veux emménager dans une cabane de jardin avec des copains)

— Wheeler Dealers. RMC. (pour si t’as une vieille Mercedes à retaper, admettons. Pourquoi le titre est aussi en anglais, je l’ignore.)

— Van Mecanic. RMC (Pareil. En fait, je le sais mais bon)

— Les reines de la mécanique. RMC. (Bientôt les homos de la mécanique, les Noirs de la mécanique, les vegans de la mécanique).

Je ne parle pas naturellement des Marseillais ni de Hanouna, ces sommets d’art pour l’édification des jeunes générations… 









Je comprends le monde.


Car je viens de réaliser que la soi-disant objective et incontournable « loi du marché » n’est en vérité que la loi du marchand. Qu’est-ce qui l’oblige à vendre un produit ou une denrée rare, plus cher, alors qu’on sait que ledit vendeur est un être humain et qu’il a comme vous et moi des burettes et un cœur ? L’avidité, peut-être ? Ne soyez pas vulgaire.

Je re-cite ce plaisant paradoxe :

Un cheval pas cher est rare. Or ce qui est rare est cher. Donc un cheval pas cher est cher.













Allez, un petit tour sur le front du langage :


Déjà pointée dans un post précédent, la disparition du style indirect 


Par exemple : 

« Je ne sais pas quel gougnafier a changé ma serrure » devient :

« Je ne sais pas c’est qui… ! » (Avec en fait et du coup, naturellement, à chaque bout) ou encore « J’ignore pourquoi mets-tu ton doigt ici ? » (avec… méfiance, ou une certaine curiosité)


Une tournure suburbaine qui commence à faire son chemin :

Il m’a insultée de salope


Un qualificatif dont le sens a glissé :

On entend les jeunes générations utiliser de plus en plus souvent « je suis choqué » pour dire simplement « diantre ! me voilà tout soudain fort ébaubi, c’est inouï ! » (en oubliant le caractère déplaisant ou blessant, choquant, quoi !)


Toujours gaillards, les indécrottables incessamment sous peu et à l’insu de son plein gré, inventions plaisantes des Guignols dans les années octante, mais qui deviennent la norme, l’air de rien. 


La faute vedette en ce moment :

Elle s’est faite rattraper

(Elle s’est faite à l’idée d’accord, mais : elle s'est fait semoncer vertement, et non faite)


Les poncifs qui tiennent la route chez les journalistes :

Silence assourdissant

Nauséabond

L’univers de l’artiste

Vertueux, repentance, espérance (autrement dit le retour des catégories chrétiennes, vive la calotte !!!)


Pour terminer j’ai pour toi, fidèle suiveur (follower), quelques aphorismes de haute volée :


Proust : en fait ce sont les 3 000 premières pages qui sont un peu difficiles. Après ça va.


L’avantage avec les nouveaux couverts biodégradables, c’est que maintenant, on peut les jeter dans la forêt !


Noël, ça me fout les boules.


Troncature définitive :

L’Homme n’est ni bon.


Restons-en là pour cette fois, chers amis.


La bise,


Justin